"Je me sentais infantilisée et humiliée" : à Orléans, une caissière refuse l’accès prioritaire à son père handicapé

Une jeune orléanaise de 25 ans dénonce dans ses vidéos, postées sur Twitter, les difficultés qu'elle a rencontré pour faire valoir les droits de son père, atteint de sclérose en plaques, à la caisse d'une grande surface de bricolage.

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Mercredi 21 octobre, en fin de matinée, Sarah Nedjar se rend au magasin Bricorama d'Orléans avec son père Kamel. Ce dernier est atteint de sclérose en plaques depuis plus de 15 ans : "tout son système nerveux le fait souffrir. Il ne peut pas rester debout et immobile trop longtemps", nous explique la jeune femme. Il détient une carte d'invalidité, facilitant son accès aux transports, salles d'attente et magasins.

"Elle m'a répondu : "allez derrière et faites la queue comme tout le monde"

Ce jour-là, son père n'avait pas pris sa canne, pensant se servir d'un chariot en guise de déambulateur. Le magasin étant en liquidation, elle nous explique "qu'il y avait énormément de monde et aucun chariot n'était disponible. Je lui ai dit que nous allions rester en mouvement et prendre des choses légères".  Arrivés en caisse, ils voient une file d'attente "extrêmement longue d'environ 30 personnes". Tout en montrant la carte, ils demandent à la vendeuse à passer devant, ce à quoi elle répond "là ça ne va pas être possible vu le monde qu'il y a. Une réponse sèche et sans hurlement", relate Sarah.

Comprenant la douleur de son père, elle insiste et accuse alors une nouvelle réponse de la caissière, beaucoup plus agressive :"Vous pensez qu'il n'y a pas tout le monde qui veut passer devant ?". Sarah n'accepte pas que sa demande soit considérée comme un"caprice": "Mon père possède cette carte. Et elle m'a dit "Chut. Allez derrière et faites la queue comme tout le monde". A ce moment-là, je me sentais infantilisée et humiliée". C'est cette dernière remarque qui conduit la jeune femme à filmer la scène. "J'ai voulu filmer pour que l'on voit la file d'attente que mon père devait faire alors qu'il a des douleurs". Vue près de 312 000 fois à l'heure où nous écrivons ces lignes, on peut y entendre la cassière crier "je vous ai dit d'attendre deux minutes" avant qu'elle ne dise ""Mademoiselle veut passer devant tout le monde." Le père de Sarah se tient à côté d'elle, muet: "Il m'a dit qu'il avait déjà eu affaire à ce genre de situation. Je refusais de passer à une autre caisse, j'aurais eu un sentiment d'inachevé et de frustration".  Une autre caissière vient finalement les intégrer dans la file, derrière 6 personnes, qui les ont par la suite laissé passer.

Dans une deuxième vidéo qu'elle postera sur Twitter, Sarah filme son père Kamel quelques minutes après l'altercation . Il y explique ému qu'il sort habituellement peu de chez lui afin d'éviter ce genre de situations."Mon père est sorti du magasin car il était très ému. Je ne l'ai pas suivi parce que c'est quelqu'un de très fier", explique Sarah. Elle, par contre, est restée dans le magasin et a filmé l'accueil. Ce troisième extrait sera aussi posté sur son profil Twitter.

"Le système doit inclure les personnes en situation de handicap"

Sarah comprend la pression subie par les employés du magasin en liquidation et par conséquent, soucieux de l'avenir de leurs postes. Cependant, elle estime que son père "n'a pas à subir la douleur des autres. Il a la sienne, qui n'a pas été reconnu ce jour-là".

"Nous n'en voulons pas aux clients parce qu’il y a un manque d’éducation sur ce sujet selon nous. La situation suscitait pas mal de questionnements : comment quelqu'un sur ses deux jambes peut-il être prioritaire ? On en veut à la caissière car elle a utilisé le mauvais ton, a voulu humilier mon père et n’a pas fait preuve de professionnalisme. Au-delà de ça, j’en veux au groupe car je ne suis pas censée compter sur la gentillesse des clients et sur le professionnalisme de l’hôtesse de caisse. Le système doit inclure les personnes en situation de handicap. C’est justement au vu du monde qu’il y a que la caisse prioritaire est nécessaire."

Par la suite, Sarah a interpellé le groupe Les Mousquetaires, propriétaire du magasin Bricorama où s'est déroulé l'incident, en message privé sur Twitter, par mail et par téléphone. Elle a reçu une réponse le vendredi 23 octobre sur le réseau social.
  Le magasin n'a pas souhaité répondre à nos questions et nous a dirigé vers le siège social des Mousquetaires qui nous a répondu par SMS:

Le magasin Bricorama d'Orléans présente toutes ses excuses pour la situation rencontrée par cette cliente et son père. La situation présentée dans cette vidéo est exceptionnelle et ne reflète pas le travail fait au quotidien par les équipes Bricorama. Les points de vente Bricorama respectent la réglementation en vigueur concernant l'accueil des personnes en situation de handicap et chaque point de vente possède une caisse prioritaire (généralement l'accueil du magasin). Un point avec les équipes du Bricorama d'Orléans sera organisé pour rappeler les règles en vigueur.

Les Mousquetaires

La jeune femme ne s'attendait pas à ce que son histoire soit relayée et soutenue par tant d'internautes. Elle félicite son père "de s'être affiché, car ce n'est pas facile pour lui" et se dit "contente d'avoir pris la caisse qu'ils étaient censés prendre".
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